jeudi 23 février 2012

Eau de source

Ah La Fontaine, dont le style est si limpide, les morales si clairvoyantes ! Et comme il prenait sa source d’Aesope, il ne nous blâmerait pas d’en user avec lui comme, il l’a fait lui-même avec d’autres. Ne serait-ce que pour moderniser certains traits. Par exemple, « Deux coqs vivaient en paix, une poule survint… » me parait totalement dépassé. Il n’y a pas besoin des poules, pour que les coqs se battent, c’est un argument misogyne. Les coqs se battent parce que… c’est dans leur nature. Rétablissons donc l’innocence des poules :

Deux coqs vivaient en Paix
 

Deux coqs vivaient en Paix
Sur la basse cours régnant tous deux
Chacun sur son tas de fumier
A Chacun ses poules et à chacun ses œufs.

Et le fermier s’en allait au marché
Tous les matins sauf le dimanche
Vendre les œufs de son panier
Revenant poches pleines, souriant aux anges.

Or il livra  un tas de fumier un matin,
Plus grand que d’ordinaire
De la paille, de la merde, du purin
A recouvrir la terre.

Venant tout droit des étables et des écuries,
Une montagne de crottin et de bouses mêlées
Aussitôt l’Everest suintant provoque jalousies
Et aussitôt c’est la curée

Aussitôt les deux coqs se toisent, se mesurent
Qui donc aura la gloire d’approcher le soleil
De contempler de si haut dame nature
De vivre dans le ciel.

« C’est moi dit le premier, car j’étais là avant ! »
« Que nenni, réplique l’autre car je suis le plus méritant ! »
Gonflant ses plumes : « Mes œufs  ont un petit goût de miel ! »
« Vous pondez des œufs, vous ? Enfin du neuf sous le soleil !»

Ce trône est pour moi
Quoi qu’on en dise
Vous, Vous êtes déjà
Au sommet de la sottise ».

Piqué au vif
Le sot s’énerve, se rebiffe,
S’approche en traître par le côté,
L’ergot saillant, le front baissé.

Et l’attaque est fulgurante
En trente secondes ne sont plus que plaies saignantes
Les deux oiseaux multicolores
Se pressent l’un l’autre à rencontrer la mort.

Et c’est chose faite
L’un agonise
L’autre, de la merde monte au faite
Fier comme si c’était la tour de Pise

Il y mourra deux jours plus tard
Ses plaies envenimés
Quand les poules, quelle histoire !
Sont toutes déboussolées,

Et pendant des semaines,
Il n’y a plus d’œufs dans le panier
Sans même chanter la rengaine
De Perette et le pot au lait.  

La jalousie est un poison
Qui rend l’air irrespirable
Et sans qu’il y ait nulle raison
Prend des proportions incroyables.

Ainsi en est-il de tous temps
Depuis Caïn et Abel
Battu à mort bien qu’innocent
Pour un simple sourire du ciel.

Le Christ n’a pas délivré l’homme en souffrant,
De ce péché originel
Amis, si Dieu souffre de tels châtiments,
Sachons  rester simples mortels.  

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