dimanche 29 septembre 2013

Rouages internes



La mort t’effraie, moi, je l’attends
Tu ne voudrais pas mourir sans
Avoir vu, ces îles aux sables blancs,
Ces forêts sombres, humides et denses.

Et ton rêve te tient en son haleine
T’aide à passer le jour et à porter ta peine
Moi, je pense au calme de mon père mort,
Apaisé et serein, ne craignant plus le sort.

 
Qu’importe la couleur du sable
Les forêts de banians, de ficus ou d’érables
La vue sur la plaine me ravit, me contente
Je ne passerai pas ma vie en une futile attente.

 
Savoir qu’elle a une fin me comble et me rassure
Avec elle enfin finiront mes blessures,
Ma brave amie, de tous lieux, de tous temps
Que j’invoquais souvent , déjà, étant enfant.

 
Ne plaignons pas les pierres, mais plaignons les souffrants
Ne pleurons pas les morts mais plutôt les vivants,
La vie où qu’elle soit est souffrance,
Sous les cieux étrangers ou sous le ciel de France.

mardi 24 septembre 2013

Dialectique du poète et de sa muse



Une belle femme, le plus sot poète,
L’une rêve en souriant, l’autre rime à tue-tête
Lui se pare de mots, énormes et vains
Réclame un hochet de grand écrivain,

 
Trahit, plagie, anone et répète,
Chaos dérisoire où l’esprit s’entête.
Elle, ses yeux brillent, la vie s’y reflète
Ses calmes sereins avant ses tempêtes,

 
La ride du lac où surfe le vent
Finit sur ses lèvres en acquiescement
Son profond silence est un pur sonnet

Car un vrai poète sait rester muet.

dimanche 8 septembre 2013

Premier chapitre de la thermodynamique du vers

Devons-nous avoir peur de la poésie ? Pouvons-nous définir une pression poétique telle quelle deviendrait insupportable, ou d'une puissance telle qu'elle déformerait les esprits ? Est-ce le nombre de mots par unité de temps, le nombre de rimes, est-ce l'octosyllabe ou l'alexandrin qui permet la meilleure pression ?  Quel est le lien entre pression et température ? La notion de poème parfait a-t-elle un sens ? La poésie est-elle un phénomène adiabatique ? Quoiqu'il en soit, malgré l'utilisation du rythme et de la rime, l'entropie poétique est toujours positive.  

Pression poétique des poèmes parfaits

Une rime
Et tu t'animes
Trois vers
Est-ce pervers
Une strophe
La catastrophe
Puis deux
Mais c'est odieux !
D'alexandrins
Que c'est malsain
Sous douze pieds
T'es oppressée.

Tout un Sonnet ?
Tu es sonnée.

Et dans cette pression poétique
Tu t'affoles et tu paniques
Elle est trop forte
Et elle t'emporte
Dans le silence
Et l'inconscience
Dans les profondeurs
De ton cœur.




lundi 2 septembre 2013

Poète maudit ?

Comme je l'ai fait un nombre multiple de fois, j'ai composé un poème sous l'influence d'une de mes collègues dont le brun des cheveux et du regard faisaient un beau contraste sur sa peau légèrement sombre. Cela n'était pas sans évoquer Soulage, grand peintre qui a beaucoup travaillé sur le noir. J'ai l'habitude de remercier mes muses en leur envoyant le résultat de ce qu'elles provoquent. J'ai été mal reçu bien que le poème ne comprenait aucun sous-entendu et était accompagné comme toujours de précautions oratoires sur son caractère innocent. J'avoue que j'aime et que je déteste cette situation.

Je la déteste parce que elle est  désagréable. Je me suis fait plaisir, j'ai voulu le partager et j'ai été inopportun et incompris.

Mais j'aime cette situation parce qu'elle pose des questions, notamment celle-ci : pourquoi peut-il être considéré comme indécent d'envoyer un poème - sans sous-entendu, proposition...   à une femme ?   Cela n'était pas le premier mais le second, "mais le premier était court " m'a-t-elle dit, comme si la longueur avait une influence (5 strophes de 4 vers, vous pensez si c'est long !  Décidément un poème finalement est toujours trop long). Il s'était passé bien 1 an entre les deux envois dont plus 6 mois sans que je la revois. J'ai connu des séducteurs plus empressés.  Et puis si la poésie était un moyen de séduction, je le saurai. Réellement, l'effet le plus visible est la différenciation : c'est un poète, sous-entendu un fou, un benêt.... pas beaucoup de points communs avec le parfait prince charmant.

Un de mes collègues qui lui dit tous les jours, qu'elle est "son soleil" est factuellement bien plus insistant même s'il est - je pense - tout aussi innocent que moi. Cependant il a 10 ans de plus et peut-être n'est-il pas perçu comme un danger. Qu'est-ce donc qui est craint ? Pourquoi la forme poétique pose-t-elle un problème supérieur ? Parce qu'elle est plus puissante ? Mais ne faut-il pas juger d'une puissance sur sa puissance ou sur sa finalité ? Faut-il craindre le feu ? celui du bûcher ou celui de la bougie ? Celui qui détruit ou celui qui éclaire ?  Cela pose la question de nos jugements toujours très instinctifs.

J'aime aussi la poésie pour cela, la rime dans sa contrainte assumée a parfois plus d'intelligence que mon esprit qui ignore les siennes.

 
Poème à la muse qui ne se savait pas

Ah, mon dieu, quel crime
Je vous ai envoyé des rimes
Et j'ai osé sur le papier
Parler de votre beauté.


Par pitié, pardonnez moi
Je ne voulais causer votre émoi
Car c'est vraiment un jeu d'enfant
De s'amuser en rimant.

C'est un  bien étrange légo
D'emboîter  ainsi les mots
C'est mon vice et ma folie
Le plus grand plaisir de ma vie.

Je sais c'est très mal élevé
D'avoir ainsi voulu jouer
Avec vous sans vous prévenir
Qu'il n'y a rien à retenir.


Qu'un simple sourire amusé
A l'influence de votre beauté
Sur mon piètre esprit  si bête
Qu'il se rêve parfois poète.


Navré que vous n'ayez souri
Mes vers n'étaient pas réussis
Ou peut-être ne savez vous pas qu'existe
Cette race étrange des artistes.

Ou peut-être jamais rencontré
De ces grands inadaptés,
Qui laissent la beauté, l'innocence
Prendre barre sur leur existence.

Certains prennent des photos
D'autres jouent avec les mots
D'autres les doigts plein de peinture,

Tous révèlent une autre nature.

Ce que les autres voient à peine
Ils s'échinent à perdre haleine
A en souligner le miracle,
Et à en être aussi l'oracle.


Ainsi voilà vous êtes une muse
Vous l'ignorez, si je ne m'abuse,
C'est votre droit de vouloir l'ignorer
Je n'ai plus qu'à m'incliner.


Je repars avec mon poème
Et ma pauvre âme à la peine
Triste que trois mots de joie
Puissent provoquer de l'effroi.

Et  demeurant toujours pervers
Si j'écris encore quelques vers
Dictés par l'un de vos charmes
N'ayez pas le cœur en alarme.

Je ne les dirai plus qu'au vent
A peine nés, déjà néant
Ainsi en est-il de la poésie

Comme de la beauté de la vie.