jeudi 28 juillet 2011

Psaumes

Le prêtre qui officia pour la crémation de mon père, m’a dit que bien souvent ceux qui parlent au sujet du défunt sont des personnes qui ne l’ont pas connu. J’ai vu ainsi des proches partir sans que nous partagions ce qu’ils étaient réellement, avec comme accompagnement de la douleur du deuil une brochette de platitudes. Je voulais autre chose pour mon père. En même temps je voulais porter la consolation à mes proches. Comment consoler de la mort quand nous ne croyons pas à la vie après elle : en notant la beauté de la vie et en notant ce qui survit à la mort, les valeurs, l’esprit. J’ai d’abord imaginé une expérience sociale, rappeler simplement nos prénoms, quasiment tous issus de saints martyrs. Peu d’entre nous s’appellent César, Napoléon, Clovis et tant Pierre, Paul, Jacques…Nous ne portons pas les noms des empereurs mais d’hommes morts comme des repris de justice mais innocents et porteurs d’un idéal d’amour et de justice. Ceci me paraît un signe de la force du spirituel sur le temporel. Quand quelqu’un disparaît son esprit nous reste… En revanche en réfléchissant un tout petit peu, j’ai réalisé que gloser sur de la « philosophie » dans de telles circonstances, est impossible, vous ne pouvez pas lire les yeux embués de larmes, énoncer de la logique la voix cassée par l’émotion. Mais réciter de la poésie, c’est possible, je l’avais déjà fait. Avec l’idée du prénom et des saints, m’est revenu comme une évidence la phrase du Christ « Tu es Pierre et sur cette pierre, je bâtirai mon église », et le texte suivant m’est sorti malgré l’émotion :           

Mon père,

Un mot pour te rendre hommage
Aussi pour faire le partage
De cette peine si féroce
A chacun selon sa force.
Si tu ne devais nous quitter
Tu en prendrais bien la moitié
Toi qui fus toujours si solide
Le regard noir, l’œil impavide
A croire que très tôt, tu t’étais promis
Je suis Pierre et sur cette pierre, je bâtirai ma vie.

A tes proches si dévoué,
Tu les as tant de fois aidés
Souvent bonnes tes solutions
Ne souffraient pas la discussion.
Mais toujours là dans la tempête
Faisant front, lui tenant tête
Toujours à prendre ces décisions
Qui n’ont jamais l’absolution
Et ceci, ce n’était pas une peccadille
Tu es Pierre et sur cette pierre, tu as bâti ta famille.

La poste, travaillant avec toi
J’y ai aperçu ton aura :
« Je suis le fils de Pierre », ces mots
Un sésame. « Ah t’es le fils de Pierrot ».
J’ai dû attendre l’arrivée
De tes petits enfants tant aimés
Pour voir - tu leur laissais tout faire -
Ce que tu avais de lunaire.
Car la lumière jouent sur les pierres selon l’heure
Tu es Pierre et sur cette pierre, tu as bâti ton bonheur. 

Car qui plus que toi fut heureux ?
Toi qui toujours fus amoureux
De celle qui t’es restée fidèle
Jusqu'à ta dernière étincelle.
Certains croiront à de la chance
Moi je crois à ta persévérance
L’honnêteté guidait tes choix
On le paye, mais cela paie aussi parfois.
Et je te donne raison ici
Tu es Pierre et sur cette pierre, tu as bien bâti ta vie

Et puisque je parlais de partage
Si j’examine mon héritage
Ce que gardent mes enfants de toi
Je ne suis pas déçu, ma foi.
Unis, serviables, persévérants
Travailleurs, Courageux, francs
Cette pierre de faite n’a pas de jeu
Ah si ! Gabrielle boude un peu.
Papa, ce qui reste des hommes, c’est l’esprit
Tu es Pierre et sur cette pierre, comme moi, ils bâtiront leurs vies. 

Une chose que j’ai réalisé après coup : Mon père s’appelait Pierre, je m’appelle Chris et ma fille aînée Gabrielle, et pour le jour de son départ les paroles du Christ à Saint Pierre me reviennent comme une évidence et je les adapte à notre petite vie de petits français. Ce texte, ce thème n’est pas venu à mon frère, mes oncles, ma mère. Pourquoi moi ? Hasard ou harmonie ?

Le monde est paraît-il descriptible par des fractales, des motifs identiques, de différentes tailles qui se répètent : les galaxies sont des systèmes circulaires qui s’éloignent (avec un mouvement de rotation ?) autour du centre de l’univers. Les galaxies sont un ensemble de systèmes stellaires tournant autour d’un trou noir central, avec des planètes qui tournent autour d’étoiles. Ces planètes ont des satellites, des anneaux tournant autour d’elles, des atmosphères avec des perturbations qui ressemblent vues du ciel à des galaxies, et l’écorce terrestre tourne plus ou moins autour du noyau et jusqu’à la matière où l’électron gravite autour du noyau. Autre merveille des fractales, les choux-fleurs, les choux romanesco, les carottes sauvages – grosses fleurs constituées de fleurs moyennes constituées de petites fleurs – et nous ? Petits motifs répétés pour former un motif bien plus grand ? Pourquoi ferions-nous exception ? Oh rien de nouveau dans ce vertige Pascalien des deux infinis, dans cette harmonie pythagoricienne des sphères, simplement une justification de l’indécence du poète,  de l’orgueil de Suetone « je suis homme et rien de ce qui est homme ne m’est inconnu », de la supplication de Villon « Frères humains n’ayez contre nous le cœur endurci, car si pitié de nous pauvres avez, Dieu en aura plus tôt de vous merci », du sarcasme de Baudelaire « Hypocrite lecteur, mon semblable, mon frère », de la sagesse de Lévinasse « L’autre est le plus court chemin de soi vers soi ». Et la source d’une profonde rêverie : si nous percevons le petit motif, ne peut-on imaginer le grand ? Les grands ? Le peuple chou, le peuple carotte… A quoi ressemble donc le champ de l’humanité ? Devons nous le voir comme un chaos d’individus ou comme un paysage, une prairie semée d’une multitude de plantes, de fleurs ? De quoi l’autre est-il donc le motif ? Quelle harmonie porte-t-il donc ? 
Avec un peu de chance, il me reste quelques années pour faire des hypothèses, les vérifier par expérience, écrire ma thèse « du choux et de la carotte de l’humanité », je crains de manquer de temps pour un si long exercice, mais cela est tentant et peut être ma fille, mes enfants complèteront-ils le motif et l’esprit sera sauvegardé ?      


               

mercredi 27 juillet 2011

Le gué

Poète en série certes mais pourquoi ne pas les mêler ? Faire une tresse, varier les plaisirs, faire contraste. Et puis à rester penché sur la même eau sombre, vous pourriez croire que je broie du noir. Ce qui n’est pas le cas du tout. Il y a des moments difficiles rares mais aussi des moments joyeux car à tout prendre je choisis la joie. Dans mes séries, il y a l’opposition, la complémentarité masculin – féminin. Les femmes naissent dans des fleurs, certaines dans des roses sur une culture hors sol – belle tige, belle couleur mais aucun parfum, uniquement décoratives à vendre 5€ la dizaine – et d’autres sont du terroir, bleuets, coquelicots, bruyères, lavandes, jasmins, lilas, muguets, vieilles roses parfumées, lys, marjolaines, carottes sauvages, myosotis à cueillir soi-même, à admirer sur pieds. Les hommes naissent eux dans les choux. Et les choux-fleurs eux que font-ils ? Certains dépriment :       

Névrose potagère

Au potager triste névrose
Car le chou fleur se rêve rose
Ou à défaut pour son bonheur
Être placé parmi les fleurs
Car leur beauté, et leur parfum
Les rapprochent du divin
Elles esquissent de leurs pétales
De belles étoiles végétales.

Si mal nommé, le chou-fleur pue
Tout boursouflé, moche, trapu
Les fleurs le boudent, l’injurient
Sur son odeur de fruit pourri
Ne pouvant être du gratin
Fleurir gracieusement le jardin
Et se compter parmi les belles
Il rêve d’une fin en béchamel.

mardi 26 juillet 2011

Perte

Etant formé à la base aux mathématiques et à la logique, je suis toujours surpris par certains phénomènes, certaines résonances dans le désagréable – la multiplication des pertes - bien que je sache qu’elles existent et même dans le pire… et également dans le meilleur, mais là je les prends sans m’étonner plus que cela – profitons des belles choses ! Ici, la poésie, l’écrit n’est peut-être que la mise en conscience qui permet d’arrêter le phénomène, puisque c’est le résultat de ce poème – j’ai arrêté de tout perdre (A moins que je fasse plus attention ?). Ce qui est également intéressant c’est que la solution au mal-être est énoncée avant d’être connue « serre moi la main… ». Mon inconscient est plus intelligent que mon conscient et Tornado plus que le sergent Garcia, ma poésie plus que ma prose. C’est troublant par rapport à ce que j’ai reçu comme enseignement Cartésien où le vivant est décrit comme « animal machine » et pourtant quoi de plus mécanique que la raison ? Deux hommes guidés par l’unique raison font rigoureusement la même action raisonnable dans une même situation, raisonnement que l’on pourrait certainement inscrire dans un code informatique, une machine, code informatique contre code génétique, ne passerions-nous que d’une prison, d’un déterminisme à l’autre ? Ou peut-on être libre de soi-même ? Quel équilibre entre sens et liberté ?

Et oui, je me pose des questions de bac de philo devant tout le monde en même temps que je fais un exercice cathartique. C’est indécent et ce n’est même pas drôle. Je devrais présenter mes excuses, arrêter, mais cela me fait du bien… Que ne demande-t-on pas à ses amis ! Bah ils feront semblant au besoin. Bon le « poème » du jour :


Perte

Je perds tout, depuis deux mois,
Avant, cela ne m’arrivait pas

J’ai perdu ma carte de décryptage
Je n’ai plus le secret du langage
J’ai perdu mes clefs
Je n’ai plus de refuge
J’ai ensuite perdu ma montre
Car il n’est plus temps
Et j’ai aussi perdu les écouteurs de ma radio
Et je suis seul face au silence du monde
J’ai également perdu un exemplaire de mes poèmes
Comme si la beauté du passé voulait s’effacer de ma mémoire

Et je viens de perdre le rythme et la rime
Que me reste-t-il, si le présent ne chante plus ?

Depuis que je l’ai perdu,
Je perds tout,
Je sais où il semble être
Mais c’est un leurre, il n’y est pas
Peut-être devrais-je commencer par le chercher
Et j’arrêterais enfin de tout perdre
Pour le retrouver,
Dans sa maison,
Juste en face de la mienne

Ou ne vais-je pas m’y perdre moi-même ou m’y trouver?

Serre moi la main, mon enfant
Ne me perd pas

Car je ne sais même plus quand un poème est terminé

lundi 25 juillet 2011

Dol

La poésie est un divertissement, un parmi tant d’autres, mais il est des jours où se divertir est essentiel quand l’esprit, envahi par la peur, revient de manière quasi-masochiste à un avenir sombre qui n’est pas encore présent et qu’il sera toujours l’heure d’affronter le moment venu. A y réfléchir, c’est encore une recherche d’équilibre entre la beauté et la dureté du monde mais ici plus formellement entre deux avenirs l’un d’une grande dureté émotionnelle et l’autre dans la paix du recueillement et de la prise de recul. Emmanuel Carrère raconte dans « d’autres vies que la mienne » comment un époux s’assomme de jeux video en attendant le décès de son épouse. La poésie a cela d’intéressant comme divertissement comparativement au jeu video ou d’autres échappatoires, est qu’en nommant la peine, la douleur, il est possible de s’en détacher davantage. Comme toujours, il s’agît d’affronter les situations ou de les fuir, sachant que la fuite est une stratégie parfois intéressante. La meilleure étant peut-être celle du dernier des Horace affrontant l’un après l’autre ses ennemis blessés en mêlant fuite et affrontement. Peut-être est-ce la grandeur de la poésie, de l’art en général, son équilibre : décrire l’horreur par le beau ou tout au moins par le symbolique, la fuite par la forme pour un affrontement sur le fond…     

Ca y est !

Ca y est, ton père va mourir
Il n’y a pas d’endroit où fuir
Et même la philosophie
Devient un passe temps gratuit.

Pourquoi donc ai-je tant de peine
Je savais qu’il n’avait pas de veine
Quand c’salaud de crabe l’a attaqué
Je savais qu’il était condamné.

J’ai beau essayé de rester froid
Mon salaud d’esprit ne veut pas
Il m’oblige, c’est dégueulasse,
A voir le futur en face.

Hein p’tit con comment vas-tu faire
- C’est cela qui te désespère -
Pour le dire à sa petite fille,
Pas moyen d’être tranquille.

C’est sûr devant ses yeux clairs
Tu ne sauras pas comment faire
Comment lui dire, lui expliquer
C’est tellement dur à avaler.

Elle en avait encore besoin
De papy qu’était au p’tit soin
Lui qui avait appris à sourire
En la voyant éclater de rire.

Ils formaient pourtant une belle paire
Et l’un des deux va au cimetière
Et l’autre va rester là
A s’écouler dedans mes bras.

Ce n’est pas facile de consoler
Ma mère qui va s’effondrer
Mais que dire à une enfant
« Que la vie, c’est pas toujours marrant » ?

J’ai beau dire qu’il me faut sourire
M’ordonner « pauvre crétin respire ! 
C’est qu’un mauvais moment à passer
T’as pas le choix, t’es obligé.»

N’empêche que c’est difficile
D’annoncer cela à sa fille,
Que j’aime vraiment plus que tout
Que je veux protéger de tout.

Et puis à son frère, à sa sœur,
Mon Dieu, j’en ai marre d’être en pleur
C’est pas possible y a une fuite
J’ai attrapé une sinusite.

Ce soir, demain j’irai marcher
Jusqu'à un endroit élevé
Je ne sais pourquoi le ciel
Dans ces instants toujours m’appelle.

Il y aura forcément une croix
Une chapelle ou une Santa Maria,
Et juste sous le ciel bleu
Je m’assiérai, ça ira mieux.

Je me sentirai tout petit
Dans ce paysage infini
Ma peine deviendra tout petite
A condition de le dire vite.

A regarder le crucifié
Ou bien sa maman en pitié
Que ne faut-il pas de malheur
Pour que s’adoucissent les cœurs.

Et même dans les fugues de Bach
Je ne le cite pas, pour faire le crack
Il faut de bien sombres arpèges
Pour que les aigus nous élèvent.

jeudi 21 juillet 2011

Dolent

Comment se préparer, peut-on se préparer à une perte si lourde ? J'ai essayé et cela m'a réellement aidé. La poésie dans ce cas permet de trouver, de magnifier, de fixer l'état d'esprit dans lequel nous souhaitons être face à l'évènement, sans le nier dans sa douleur mais en l'équilibrant par la beauté de la vie et d'y revenir vite au besoin car si nous l'avons décrit, c'est qu'il existe.

Le précieux équilibre

Sourire aux lèvres, les larmes aux yeux
Je te suivrai pour tes adieux.
Le bonheur de t’avoir connue
Le malheur de t’avoir perdue
Sous ce ciel bleu dans cette paix
Se mêleront dans un bouquet
De souvenirs attachants
A certains regrets lancinants.
Comme un parfum sucré
Contient des acidités.
Je préserverai dans mon âme  
L’éclat vacillant de ta flamme
Avant qu’elle s’éteigne sans bruit
Et ne se soit évanouie.
Je ne laisserai pas mon regard
Ramper à terre comme un lézard
Serpenter de tombe en tombe
Et se perdre parmi les ombres.
Mais je laisserai mes pas
M’amener loin des trépas
Errer un peu sur la colline
Où se fanent les aubépines
Mais où la terre se dégage
Sur le ciel et les nuages.
Et je remercierai les nues
Du bonheur de t’avoir connue,
Mes larmes s’écouleront sans fièvre
Mais j’aurai le sourire aux lèvres.

NB : L'objet de la perte est féminin dans ce poème. C'est un a priori car ce qui m'est cher est plus souvent féminin que masculin, mais il fallait faire un choix car notre langue est ainsi : tout a un genre. Mais l'amour, lui n'a pas de genre, pas de sexe, à croire que notre langue pour qui selon le nombre, le mot amour change de genre, est pleine de sens.  

vendredi 15 juillet 2011

Détournement

La poésie au sens classique repose sur les rythmes et les rimes. Vous les choisissez bien comme vous voulez, si vous choisissez des rimes en "or" en "ite" sur des vers courts et saccadés, vous pourrez avoir un effet d'orchestre de jazz par exemple, mais tout dépend quelles sont vos images les "on" de "violon"  ou "d'explosion" ne sont pas identiques et l'objectif pour moi est de les faire résonner. La beauté est une résonance intérieure, comment l'autre résonne en vous, avec vous et par vous et la poésie est idéale en tant que texte résonnant pour évoquer celle de la beauté du monde qui nous entoure. Ma poésie joue avec les résonances des femmes, des hommes, des situations que je rencontre. Ce que je voulais faire ici, c'est donner à ces poèmes une chance de résonner avec un autre.

Manque de chance, j'ai perdu mon père et les résonances qui se pressent à mon esprit sont plus funèbres et plus lourdes, et je n'ai pas envie de les taire. J'ai entendu une chanson "Nadine" des négresses vertes, elle est bien faite en petit cliché social mais elle m'a blessé car "rien de nous résume", l'homme n'est pas résumable :

Résurgences

Le nom d’Everest ne suffit pas
A décrire ce qu’il est
Moins encore ce qu’il n’est pas
Ni le magma où il est né.

Rien ne nous résume
Ni une photo ni un nom
Aucun des goûts que l’on assume,
Nous sommes bien plus profonds.

Nous sommes l’histoire de nos familles
Somme de petits incidents
Qui dans les mémoires s’éparpillent
Mais reviennent en un instant.

Sur un simple coup de tête
Une lumière ou un parfum
Qui nous aveugle ou nous entête
Nous amène à serrer le poing

Sur une main chère absente
Qui ne sera plus le bâton
Que nous serrions en entamant la pente
Le chemin n’en sera que plus long.

Et c’est en vain que l’on invoque
Le nom de l’absent aimé
Les souvenirs que l’on évoque
Ne sont que d’acres fumées.

Quand le nom n’aura plus de sens
Que les larmes auront séchées 
Le nom sera une part du vent
Qui chante dans les peupliers.

Ainsi dans le silence de l’hiver,
Dans le tranchant de la gelée
J’entendrai chanter la pierre
Que le soleil vient réchauffer.

  

jeudi 14 juillet 2011

Fin de série

C'est la période des soldes, je vide le stock. 3 pour le prix d'un mais ils sont courts. Je ne voudrais pas épuiser ceux qui s'égarent ici ou un fidèle - Edouard un mouton noir à blog dont la soeur s'appelle Raoul,- m'a dit s'être inscrit à ce blog, mais la liste des inscrits à mon blog reste vide. Soit il me ment, soit les membres sont déjà nombreux et je l'ignore, échappant ainisi à la pression de l'exigence de mes lecteurs - notamment en terme d'orthographe.

J'aime tout particulièrement le dernier. Récemment un installateur de cuisine, visiblement très terrien visitant ma maison en vente, parlait de ses enfants qui à 20 ans sont toujours dans ses jambes "J'espère que ça durera, les enfants nous aide à rester propres". J'aurais plutôt dit que les enfants épurent notre amour de l'égoïsme, du désir et de l'égoïsme du désir. A défaut d'être plus précis, son expression est plus puissante. Chacun son style, mais j'aime bien quand certaines réalités humaines non darwiniennes sont partagées par des personnes en apparence très différentes.


Bisous du soir, espoir

Les bisous de tous les soirs
Ceux juste après l’histoire
Éloignant les cauchemars
Qui se cachent dans le noir.
Ceux de la fin de journée
Servent souvent à consoler
Des enfants très fatigués
Soudain frappés de surdité
Qui feraient n’importe quoi
Pour demeurer avec moi.
Il nous faut parfois crier
Pour qu’ils cessent de piailler
Après deux ou trois verres d’eau
Ils vont enfin au dodo,
Mais se relèvent bien vite
En prétextant une fuite.
Il faut mimer la colère
Pour enfin les faire taire
Et goûter exténués
Nos trois minutes de paix
Ce tout petit plaisir
Juste avant de s’endormir.

Bisous du matin, câlin

Trois petits bisous furtifs
Après un bonjour hâtifs
Un « tu as bien dormi mon cœur ? »
« Dépêche toi, tu as vu l’heure ! »
« Mange au lieu de rêver
Il est l’heure de s’habiller ».
ARRRRRRh c’est fini
Car à partir d’aujourd’hui
Nous commencerons le jour
Par un petit mot d’amour.


Les baisers

Souviens-toi nos baisers
Ils sont bien moins épicés.
Est-ce que nous vieillissons ?
A moins que nous nous épuisions
A embrasser nos enfants
Vivement qu’ils soient grands.
Ne soyons donc pas si pressés
C’est si doux à embrasser.
Ne m’en veux pas ma princesse
De mes instants de faiblesse
Mais je comprends de nos jours
Pourquoi nous faisions l’amour.

lundi 11 juillet 2011

Poésie ou Histoire poétique ?

Après avoir m'avoir fait parvenir mon diplôme de poète, Sophie m'a demandé un petit mot pour ses élèves du villages de Coursières dans l’Allier. Elle s'était vantée de connaître le poète. " Tu te rends compte, elle connaît un poète !".Comme si c’était extraordinaire.
Mais à tout prendre, qu'est-ce qu'un poète ? Un imbécile qui passe son temps à écrire des phrases sur un certain rythme et parfois avec des rimes, ou le contraire, ou même pas,… plutôt que d'aller aux champignons…Remarquez, il peut aller aux champignons et ne faire de la poésie que dans des instants où le choix est plus restreint : écrire un poème en attendant le bus ou seulement attendre le bus et s’ennuyer. Bon un poète n’est pas forcément un imbécile mais il n’est pas extraordinaire non plus – j’en connais plein qui me disent écrire de la poésie après que j’ai parlé de ce passe-temps, un peu comme une maladie ou une habitude légèrement honteuses. En fait les poètes c’est comme les champignons, il y’en a beaucoup mais on ne les voit pas, quand il y en a un qui sort, s’il est comestible, on s’extasie « Oh regarde le beau cèpe ». Et puis il y a beaucoup de champignons non comestibles ou culinairement médiocres, d’où l’importance d’être référencé chez les pharmaciens, euh d’avoir son diplôme de poète. Il fallait donc je remercie ces enfants avec un petit poème bien sûr…le voici : 

Aux magiciens de Coursières

                                 Avec l'amour maternel, la vie vous fait à l'aube
                                 une promesse qu'elle ne tient jamais.
                                            Romain Gary

                                             Pas si sûr !

Magie

Ah ! quel beau jour radieux
C’est vrai, je n’en crois pas mes yeux
J’étais juste un homme, sérieux
Ingénieur et ennuyeux.

Mais me voila transformé,
Depuis que je suis diplômé,
Par les enfants de Coursières
Imaginez, si je suis fier.

Ils m’ont changé en poète
J’ai depuis le cœur en fête,
Je vois la vie en couleur
Je peux admirer les fleurs,

Rimer pour une femme qui passe
Cela, sans qu’elle ne se fâche
« Madame, un vrai poète, je suis !
Des enfants savent ma poésie. »

« J’en ai la preuve sur moi,
Ces beaux dessins prouvent ma foi,
J’ai donc la liberté ultime
D’aimer la beauté en rimes ! »

Et, tant que ces enfants sauront
Un de mes vers et pourront
Rappeler à leurs souvenirs
Toute la chaleur et le sourire,

De leurs mamans, leurs chants, leurs jeux
De tous ces mercredis heureux
Tous ces petits instants magiques
Leurs vies seront magnifiques.

Où qu’ils soient, ils pourront s’échapper
Par la force de la pensée
Lutter contre une idée noire
A l’aide de leur mémoire.

Revenir au temps de l’enfance
Ces doux moments de l’insouciance,
Savoir se sortir de l’abîme
Par l’échelle des rythmes et des rimes.

Un poème contre un dessin ?
Je recommence dès demain !
Et vous ? Enfants, amis de Coursières ?
Et Moi ? Je continue, je persévère.

Ce que nous échangeons ainsi
Au travers de la poésie
C’est bien plus qu’un bout de papier
C’est du rêve, de la beauté …et aussi de la liberté.

Merci à vous

Chris  

Et voici, ce que me répondit Sophie :
Bonjour
Un grand merci pour le poème que tu as écrit spécialement pour mes élèves. Ils étaient très impressionnés par la taille du poème mais après une petite explication de texte, ils étaient plutôt très fiers!! Je crois qu'ils se sont rendus compte que l'on peut donner un peu de bonheur avec presque rien... et c'est une belle leçon de vie.
Quand je leur ai proposé de l'afficher, bien sûr, ils étaient d'accord pour pouvoir le lire "quand on veut". Par contre ils ont décidé de l'afficher dans le couloir pour que les parents et les autres enfants puissent le lire!! C'est le début de la célébrité!!
Merci encore pour eux.

Sophie

Je ne sais pas si c’est le début de la célébrité – ce dont je ne perçois pas l’intérêt à moins d’en vivre, mais j’en doute fort. D’autant que ce poème est trop circonstancié pour être remarquable aux delà des circonstances. En revanche je crois, mais je peux me tromper que montrer dans notre monde matérialiste que le bonheur peut tenir à des échanges de mots, de dessins, d’émotions et donner de la fierté à des enfants de 7 ans, c’est un exploit hors de portée du premier champignon venu.
….
Fais tourner le psilo.

vendredi 8 juillet 2011

Le premier poème

Hé oui, un serial poète écrit des poèmes en série et il faut retrouver le premier pour comprendre sa terrible motivation à faire des vers pour l'arrêter. Mais est-ce vraiment la première sensation à la base de tout ? (Faut bien que je mette du suspens, la poésie est beaucoup moins lue que le roman noir) Vous le saurez en restant fidèle...

Les bisous du dimanche

Les bisous du dimanche
Sont donnés en avalanche
Et tes cils papillonnent
Sous la lumière qui rayonne
Sur les lames du parquet
Pour protéger tes quinquets,
Alors ton esprit s’étire
Dans la grâce d’un sourire.

Ces bisous je les dépose
Comme des pétales de roses
Ma fille, ma tant aimée
Sur tes cheveux emmêlés
Dieu veuille qu’ils te touchent au cœur
Comme le parfum de la fleur
Pour iriser tout le jour
D’une nuance d’amour
D’une lumière sublime
Qualifions la de divine
Le père, la fille, le Saint-Esprit,
Un petit goût de Paradis.

Profitons donc de notre chance,
De ces bisous du dimanche,
Où le temps nous est donné
D’être ainsi pelotonné
Sans un bruit et sans mot
Et sans entendre l’écho
Du réveil qui crie et braille
Pour nous pousser au travail.
Trois minutes c’est bien court
Pour profiter de l’amour
Mais cette petite félicité
A un goût d’éternité.

jeudi 7 juillet 2011

Bereshit

Au commencement était l'amour, un dimanche, un long câlin avec ma fille Gabrielle. Une fois fini, elle m'a dit "j'aime les bisous du dimanche". Les bisous du dimanche... quelle belle expression poétique, car la poésie précise, identifie, magnifie. Ce ne sont pas n'importe quels bisous. Ils sont comme les habits autrefois "du dimanche". Voilà un poème qui ne demandait qu'à être écrit. Je l'écris donc et ... et quoi ? Que faites-vous de vos poèmes quand vous êtes comme moi, un poète "du dimanche" ? Rien. Ah si ! Vous l'envoyez à Catherine qui est une amie et une lectrice très gentille et elle vous dit d'un air gourmand : "J"ai beaucoup aimé ces bisous du dimanche mais.. il y a aussi ceux du mercredi". Ah oui, c'est vrai. J"écris donc les bisous du mercredi et les envoie à Catherine qui est plus encore dithyrambique - enthousiaste si vous préférez. Ah ! Je l'envoie donc à des amis et parmi eux Fred, qui le fait suivre à sa femme Sophie qui est institutrice et qui le fait apprendre à ses élèves pour la fête des mères. Un de mes poèmes est appris par des enfants, pour la fête des mères, décoré par des dessins ! Et j'ai reçu, il y a peu, encadrée, la photocopie en couleur de mon poème illustré par une petite fille, avec mon nom - le vrai - écrit aux crayons de couleurs comme un arc en ciel... comme un vrai nom de poète (A noir, E blanc, I rouge...). Pour des enfants, j'étais un vrai poète, un poète que l'on sait par coeur... Voilà donc pourquoi ce blog, pour voyager avec ceux qui le voudront en poésie sur la beauté, la force, la magie de la vie, maintenant que j'ai mon diplôme et que je peux emmener du monde.     

Les bisous du mercredi

Les bisous du mercredi
Au goût de sucre candi
De miel ou de nutella
Savouré avec les doigts.

Les bisous du mercredi
Donnés entre chants et cris,
Parmi les appels pressants
"Viens Maman, Maman...",
Pour accourir admirer
Les trésors qu'ils ont trouvés,
Une feuille morte, un vieux sou,
Un bout de bois, un caillou
Qui finissent c'est trop cloche
Toujours au fond de nos poches.

Les bisous du mercredi
Qu'on fait aux bébés hardis,
Tout d'un coup ils se redressent,
Puis retombent sur leurs fesses.
Une fois, deux fois, à la troisième
Ils s'en retournent avec flegme
Remuer les graviers bleus
Qui se trouvent sous les jeux,
Malgré leurs mains et leurs joues grises
Nous les recouvrons de bises.

Les bisous du mercredi
Rouges, verts, jaunes aussi,
Ces bisous à la peinture
Ou bien à la confiture,
Ces bisous que l'on échange
Sans cesse avec nos anges
Donnés pour un gribouillis
Reçus pour de la Chantilly.

Ces bisous en défilé
Comme des perles enfilées
Sur le fil d'un collier
Et toutes dépareillées

Les bisous du mercredi
Appelés "bisous guérit!"
Qui sèchent toutes les larmes
Et apaisent les alarmes
Les pleurs pour un bobo
Les mauvais rêve du dodo.

Tous ces bisous que l'on égrène
Comme les rimes d'un poème,
Une ode à la vie qui passe
Et dont jamais on ne se lasse,
Heureux quand on la savoure
Toute parfumée d'amour.